Personnellement cela ne m’intéresse pas du tout de vous parler du Costa Rica.
Comme s'il n'y avait qu'un seul Costa Rica ...
Surtout, d'autres que moi font cela bien mieux.
Voyez par exemple Wikipedia, le bon vieux Routard, le Petit Futé et autres Lonely Planet.
Ce dont j’ai envie, c'est plutôt de vous parler de MON COSTA RICA à MOI.
Celui que moi-même et ma famille vivons au jour le jour, a lo largo de la manera (chemin faisant), con el tiempo (au fil du temps).
Pays parfois merveilleux, souvent quand on y pense, d'autres fois horripilant, un peu comme la vie en général. En un peu mieux ...
Je vais essayer de vous le présenter, sans prétention, façon BLOG.
Pas de stress, on écrira au fils du temps, quand nous aurons le temps ... Pura Vida ...
@ bientôt,
L’autre matin, alors que je me hâtais - limite en retard mais pas trop - pour filer à un rendez-vous, voilà-t-y pas que mon GSM se met à sonner vigoureusement, plus vigoureusement que d’habitude, cela aurait dû m’alerter. Ne prenant pas le temps de vérifier le numéro entrant, je décroche donc imprudemment et là j’entends aussitôt en espagnol :
- Policia … bla bla bla … policia (re) bla bla bla … le tout pas très clair, la transmission étant mauvaise. Mais le « Policia », bis repetita placent, ne m’a pas échappé. Il y a manifestement dans le vocabulaire des syllabes qu'on retient plus facilement que d'autres ...
- Sur ce, je réponds au charmant policier que NO, qu’à ma connaissance - sauf erreur ou omission purement involontaire de ma part - je n’ai pas appelé la Policia, non merci, GRACIAS, vraiment pas car aujourd’hui j’ai sacrément autre chose à faire que d’appeler la Policia, le ciel est bleu, les oiseaux chantent, faut vraiment que j’y aille, tout ça tout ça …
- Et là, subitement, mon interlocuteur me demande OÙ je suis ?
Petit moment de solitude quand même suite à l’abrupte question, ça tourne à 200 à l’heure dans ma tête, je me demande ce que j’ai bien pu faire qui me vaille cet appel matinal et comment il a eu mon numéro surtout. Un instant, sans trop savoir pourquoi, je suis sur le point d’inventer et de dire que je suis à Tamarindo à 3 heures de route de la finca histoire de gagner un peu de temps … tout ça en conduisant d’une main dans le chemin boueux de la finca. Fort heureusement je me ravise et je leur annonce que je suis encore au nid car aussitôt dit, en débouchant au portail, je tombe nez à nez avec le pick-up de la Policia justement, un sbire au volant, téléphone collé à l’oreille (celui qui me parle en ce moment-même apparemment) et 2 autres déjà descendus et également pendus au téléphone … tous les 3 habillés en Schtroumpfs, le bleu un peu plus marine quand même, avec des gilets pare-balles très stylés type gilets de sauvetages pour faire plus sérieux. Le tout faisant irrémédiablement penser au Bibendum Michelin mais en bleu toujours. Le fait qu’ils n’aient pas, comme parfois en bord des routes, la mitraillette en bandoulière dangereusement posée par-dessus le gilet de sauvetage me rassure quelque peu quand même. Car la mitraillette en général c’est vraiment pas bon, pas bon du tout, ils ne savent pas trop s’en servir et un accident de baignade est si vite arrivé…
Là quand même, tout ce bleu d’un coup ressortant sur le vert tendre de la finca, je me dis qu’il y a un blême, un cheveu dans la soupe pour ne pas dire une couille dans le potage (expression vendéenne). J’ai juste le temps de penser qu’heureusement mes 4 chiens dont un dobermann très sympathique mais carrément idiot sont enfermés dans leur grand parc un peu plus loin car sinon on aurait eu du sport et pire, sans doute au grand désavantage de la maréchaussée locale qui n’aurait sans doute pas apprécié le numéro canin improvisé. Ce qui m’étonne et ne me rassure pas pour le coup, c’est qu’ils sont rentrés de quelques dizaines de mètres dans le domaine alors que d’habitude ils se cantonnent prudemment à l’entrée, je parle des bleus pas des chiens. Car la propriété privée est très respectée au Costa Rica, généralement personne ne rentre à moins d’y être vraiment contraint. Ou bien, au pire, invité. J’apprendrai plus tard que mon péon, pour une fois, me voyant pressé de partir et voulant manifestement m’éviter de descendre dans la boue du chemin (il pleut des cordes depuis quelques jours), avait pensé à m’ouvrir le portail. Il doit avoir quelque chose de sérieux à me demander celui-là pour être tout à coup aussi prévenant, il faut que je me méfie des jours à venir… Bref pas de bol, pour une fois il ouvre le portail et la maréchaussée, surgie d’on ne sait où, en profite aussi sec pour s’introduire subrepticement chez moi.
Un peu contraint et forcé, étant donné que le véhicule administratif bloque mon portail, je descends gaiement, l’air de rien, sourire de circonstance aux lèvres pour m’enquérir de ce qui me vaut cette aimable visite matinale surprise. Car ce n’est pas mon anniversaire aujourd’hui et par ici personne ne vend de calendriers muraux en carton avec des charmants chatons gris aux yeux bleus dessus.
Surtout pas la Policia !
Et là le chef du trio (el jefe), après les présentations d’usage, me parle de ma voiture … et là, subitement, j’ai comme un éclair de lucidité !
Bref retour en arrière : la veille je suis monté le matin au Parc National Tenorio, un peu plus haut en réalité pour une réunion au sommet (c’est le cas de le dire, 1.250 mètres d’altitude) à l’Hôtel Hydeway où, entre parenthèses, on mange sacrément bien, n'est ce pas Thierry ? Mon 4x4 habituel étant un peu patraque, j’y suis monté avec le mulet, mon vaillant Nissan Miller, voir post précédent. On y mange d’ailleurs si bien et nous étions en si bonne compagnie que la réunion de travail a duré jusqu’au soir, 20 heures environ. Or à 20 heures tout là-haut, ce soir-là il pleuvait des cordes sans compter les nuages qui nous donnaient moins de 10 mètres de visibilité sur le chemin défoncé. Or, le matin, après une visite au Rio Celeste avant la réunion au sommet, le soleil étant magiquement réapparu, j’avais décidé de laisser le Nissan Miller sagement garé sur le parking du Parc National Tenorio et j’avais gagné l’hôtel, un peu plus haut, à pied, tranquille comme Baptiste, sans plus m’en soucier. Au moment de redescendre dans la vallée, la totale c'est-à-dire pluie + brouillard + nuit noire + route quasi impraticable sans 4x4. Alors j’ai naturellement abandonné mon véhicule agricole sur le parking du parc et j’ai lâchement préféré profiter du gros 4x4 tout neuf de mon avocat pour redescendre dans un confort ouaté quelques centaines de mètres plus bas.
Ce faisant, j’étais loin de penser que cette décision anodine déclencherait toute une suite d'improbables évènements dont je fus l’acteur bien involontaire !!!
Je fais court car tout cela s’est déroulé tandis que je dormais du sommeil du juste après ce si bon repas. Les gardes du parc, alertés par la présence d’un drôle de véhicule resté orphelin sur le parking, ont pensé que le ou bien les occupants dudit véhicule s’étaient lamentablement perdus dans le parc. Près de 13.000 hectares le parc quand même ! Chose courante paraît-il car les touristes sont souvent imprudents, des touristes quoi ! On a même déjà déploré un noyé retrouvé après bien des heures d’efforts sous la cascade du Rio Celeste qui est aujourd’hui interdite d’approche, on admire mais de loin. Les gardes ont donc déclenché des opérations de recherche et se sont mis à courir nuitamment dans tous les sens à la recherche du ou des potentiels disparus … Ne trouvant rien qui ressemble à un ou des égarés ou bien à leurs restes, à un moment donné ils ont fini par alerter la Policia qui, à l’aide de l’immatriculation du Nissan Miller a plus ou moins rapidement localisé le propriétaire … qui d’ailleurs n’était pas moi (traitement de la vente en cours) mais le garagiste local qui n’a rien compris à ce qui lui arrivait en voyant le déploiement matinal des forces de l’ordre dans sa modeste entreprise. Mal réveillé, et pour cause, il a quand même fini par comprendre que SA voiture qui en fait était devenue depuis peu MA voiture avait étrangement été retrouvée vide d’occupants à l’entrée du parc. Pas de trace de sang ni de lutte, pas de cadavres, encore moins d’armes ou de drogue à l’intérieur, le truc incompréhensible donc. A moins que, des extraterrestres, on ne sait jamais … D’où la suite, l’arrivée inopinée de la Policia chez moi …
Inutile de dire quel fut mon soulagement d’apprendre que je n’étais pas traqué comme un vil criminel pour un délit que j’aurais commis sans même m’en apercevoir mais que j’avais simplement été déclaré disparu à l’insu de mon plein gré pendant mon sommeil. J’ai quand même mis près de 30 minutes pour me dépatouiller des policiers locaux qui ont dû, preuve à l’appui (mes documents costariciens) certifier téléphoniquement à leur hiérarchie et à celle du Parc National que j’étais bien en vie, frais et tout rose en ce matin-là, qu’ils étaient tous les trois avec moi et que c’était bien moi et pas un autre qui aurait tenté de se faire passer pour moi etc.
Et voilà, encore une histoire qui finit bien, vive le Costa Rica, Pura Vida, des trucs à raconter quand on sera vieux c'est-à-dire le plus tard possible.
Moralité : même si c’est parfois tentant et je peux aisément le comprendre, en aucun cas, n’abandonnez jamais rien à l’entrée d’un parc national au Costa Rica, ni votre femme, ni votre belle-mère, ni vos enfants, même pas une paire de chaussures ou un parapluie et encore moins votre voiture sous peine de déclencher le plan ORSEC local. Une heure de plus et j’étais mûr pour le ballet d’hélicoptères et pour affronter une meute de journalistes avides de sensation et de sang frais. Allez ensuite expliquer à la TV en langue étrangère que vous aviez disparu sans même le savoir pendant votre sommeil puis été retrouvé par la Policia sain et sauf au saut du lit.
Je le dis souvent à mes proches et à mes clients, j’aime beaucoup, que dis-je, j'adore le Costa Rica parce qu’il arrive toujours des trucs, c’est un pays où on se sent plus vivant, vraiment !